Les chroniques d'Esther H

lundi 3 janvier 2011

Hongrie : La presse muselée et le silence accablant de la France


Depuis le 1er janvier de cette nouvelle année 2011, la Hongrie a succédé glorieuse à la Belgique à la présidence de l'Union européenne.
Depuis ce même glorieux 1er janvier, une loi ignoble du gouvernement conservateur de Viktor Orban s'abat sur la presse hongroise et menace son indépendance et sa liberté. Depuis plus de six mois, les journaux se mobilisent vivement contre cette réforme des médias.
Désormais, la télévision par satellite Duna et l'agence de presse nationale seront rassemblées dans la même entité.
Le dirigeant,-ne faudrait-il pas comprendre censeur ?- sera directement nommé par le Premier ministre pour une période de neuf ans.

 Journalistes muselés...

Comme l'explique la version en ligne de 168 Ora online , http://www.168ora.hu/itthon/, un magazine web d’opposition, un journaliste invité à la radio nationale Kossuth, la semaine dernière, aurait été interdit de s'exprimer à l'antenne après avoir voulu observer une minute de silence pour protester contre cette loi qu'il considérait comme une entrave d'une extrême gravité contre la liberté de la presse.
Après un bref débat avec le présentateur, l’émission a été interrompue avant de reprendre, sans son invité.
« En tant que démocrate, j’ai pensé que je devais utiliser tous les forums possibles pour témoigner en faveur de la liberté de la presse », a déclaré  le journaliste à 168 ora.

Depuis, d'après les informations récoltées auprès de plusieurs contacts hongrois, plusieurs journalistes auraient déjà vécu cette situation à la radio. Muselés pour avoir voulu simplement observer  une minute de silence en signe de protestation ou critiquer cette réforme, qui permet ainsi au gouvernement hongrois de mettre son veto sur les médias hongrois.  Il y a un peu plus de deux semaines, un des analystes politiques les plus illustres du pays, Peter Tolgyessy, avait  refusé de continuer son émission politique à la radio nationale, après qu’on ait désigné un analyste proche du Fidesz, le parti au pouvoir, pour faire l’émission conjointement avec lui.
Comme l'explique un site hongrois jfb : "Les organes de presse devront être enregistrés auprès de l’autorité centrale des médias, condition ferme de la licence de publication, pesant même sur les médias électroniques et sites informatifs. C’est de cet enregistrement, qui, en tant que condition de fonctionnement, est finalement un outil implicite de censure politique, que la sanction la plus lourde de la MNHH peut priver les organes de presse abusant de la loi. Le budget de la MNHH, s’élevant à 29,3 Milliards de HUF, prévoit ainsi de comptabiliser 150 millions de HUF d’amendes en 2011.Un montant si élevé que le marché des journaux à caractère politique risquerait d’être mis en péril et qui pourrait causer leur possible insolvabilité. "
Une loi sans précédent dans l'Union européenne...

Cette loi, sans précédent, prévoit des amendes en effet pouvant aller jusqu’à 730.000 euros pour des chaînes de radio ou de télévision en cas « d’atteinte à l’intérêt public, l’ordre public et la morale », ou encore des « informations partiales », sans que pour autant que les règles soient clairement définis. L’adoption de la loi sur la «liberté de la presse et les normes de base des contenus médiatiques», qui centralise les services d’information et les médias publics, comme MTV, DunaTV et la Radio Hongroise (MR). Outre les chaînes publiques, la nouvelle législation porte sur l'ensemble des médias hongrois, de la presse écrite aux portails Internet et prévoit l’introduction d'amendes pour tout abus de communication de «fonds équilibrés», comme le stipule le texte adopté.
La loi peut également forcer les journalistes à révéler leurs sources sur des questions liées à la sécurité nationale. Le gouvernement hongrois qui entend organiser le « juste équilibre » de l’information n’a, par ailleurs, pas jugé bon de respecter, lui-même, ce principe lors de la nomination des membres du Conseil qui appartiennent tous au parti majoritaire Fidesz. L’opposition est curieusement absente de cet organe.
 Un nouveau système qui permet une surveillance politique en continu des informations et nouvelles diffusées, comme le souligne certains commentateurs, qui voient là "la mise en place d’un système de propagande orange".

Les syndicats des journalistes à travers l'Europe et en France, de nombreuses organisations de défense des droits de l'homme ainsi que l’Organisation pour la Sécurité et la Coopération en Europe (OSCE), sont inquiets des répercussions de cette loi sur l'indépendance de la presse hongroise, d'autant que les cinq membres du nouveau Conseil des médias (MT) sont tous membres du Fidesz.
L’Allemagne, elle aussi, a fait savoir qu'elle se préoccupait de cette réforme des médias, qui va permettre aux autorités de contrôler le contenu des organes de presse.
Malgré les récriminations de l’étranger, le gouvernement hongrois affirme avec une assurance certaine qu’il n’a nullement l’intention de modifier sa loi.« Il est hors de question de changer cette loi ! », a rétorqué le Premier ministre hongrois, Viktor Orban.

Comme en témoigne notre confrère RFI, "Cette mise au point s’adressait d’abord au ministre allemand des Affaires étrangères, Guido Westerwelle. Ce dernier, après un entretien avec son homologue hongrois, avait laissé entendre que la loi pourrait être révisée. L’Allemagne n’est pas le seul pays européen à avoir critiqué l’initiative de Budapest. Le Luxembourg, par la voix de son ministre des Affaires étrangères, s’est demandé si la Hongrie est encore digne de présider l’Union européenne à partir du 1er janvier 2011. "

« La Commission attache une valeur très importante à la liberté de la presse et au pluralisme des médias et nous suivons cette affaire de très près », a répondu simplement à l'AFP Alejandro Ulzurrun de Asanza y Munoz, porte-parole. Le silence de la Commission européenne si, il persistait en dirait long sur l'axe idéologique des partis conservateurs, PPE (Parti populaire européen) et libéraux, ADLE (Alliance des  démocrates et des libéraux pour l'Europe), majoritaires dans l'Union. L'Europe ne peut sérieusement fermer les yeux sur cette loi et rester sans réactions. 
Le groupe des Verts au Parlement européen a demandé lui  à la Commission et aux autres gouvernements de l’UE d’exiger son retrait. Le Parti socialiste français appelle les parlementaires européens à faire pression sur le gouvernement hongrois pour le forcer à reculer. Les socialistes comme le note Jean-Christophe Cambadélis :  "apportent leur soutien aux progressistes hongrois, notamment aux camarades du MSzP et à tous ceux qui luttent dans le monde pour une presse libre et indépendante".
 
La France  trahit ses fondements démocratiques en se taisant de la sorte...

Depuis son adoption le 21 décembre, d'aucuns attendaient une réaction officielle de la France sur cette loi... Elle a été édifiante et  représentative finalement des dérives du gouvernement Sarkozy contre la presse. Pendant donc, que les journalistes sont sous le coup d’une menace inédite depuis le retour de la démocratie, il y a vingt ans, le "pays des droits de l'Homme", la France du président Sarkozy " refuse de condamner la loi hongroise sur les médias par peur d'attiser le populisme".
Le ministre délégué aux Affaires européeennes, Laurent Wauquiez, estime "que la France n'a pas à intervenir sur la question des la réforme des médias en Hongrie", rapporte Jean Quatremer sur son blog.
Wauquiez, brillant et exemplaire élève du gouvernement Fillon pense lui, coquelin ou complice, que le gouvernement hongrois est "prêt à faire des adaptations".
Vu les circonstances dont la  loi vient d’être promulguée, il est difficile d'imager que Viktor Orban et son gouvernement soutenu, il ne faut pas l'oublier, par une extrême droite de poids, viennent à faire des concessions à la requête de quelques pays membres de l’Union.
Incontestablement la profession s’est indignée via des communiqués de la part des syndicats de journalistes hongrois et quelques publications qui ont publié page blanche en signe de protestation. Toutefois, en dehors d’une élite de gauche déchue de son pouvoir, quelques mouvements étudiants, jamais l’opinion publique ne s’est émue de cette réforme. 

La France ne trahit-elle pas ses fondements démocratiques en se taisant de la sorte face aux atteintes faites à la presse hongroise ?
Selon plusieurs associations de journalistes la liberté d'expression serait en recul en Hongrie.
Le Président Sarkozy, faut-il le rappeler, a mené depuis quatre ans plusieurs entreprises pour dompter à sa façon la presse. La liberté d'expression selon le dernier rapport de Reporters sans frontières est en recul, en France aussi.

 Manipuler, museler, avoir sous sa coupe les journalistes, ceux qu'un certain président prénomme "pédophiles", pour gouverner sans reproches et mener à bien sans embûches politique populiste, économie néolibérale et petits arrangements, sont-elles d' irrésistibles tentations pour la France du président Sarkozy ? Les pays européens devraient prendre garde à cette montée du populisme et à ses dérives autoritaires et se poser une seule question:
Un Etat où la presse est « sous contrôle » est-il encore digne d'être baptisé Démocratie ?

Esther H.



Repérage : Carte des élections européennes, conservateurs et libéraux dominent...

http://www.touteleurope.eu/fr/organisation/etats-membres/les-etats-membres-en-quelques-mots/presentation/carte-des-elections-en-europe.html


Quelques récentes dérives de la présidence Sarkozy qui menacent l'indépendance de la Presse

Reporters sans Frontières 
  
Loppsi : danger


Le filtrage du Net, sans décision judiciaire, avalisé par l’Assemblée nationale : http://fr.rsf.org/france-le-filtrage-du-net-sans-decision-17-12-2010,39076.html

Plainte

Claude Guéant et Bernard Squarcini poussent une longue plainte http://fr.rsf.org/france-claude-gueant-et-bernard-squarcini-12-11-2010,38811.html

Ordinateurs et données informatiques se volatilisent dans les rangs d’une presse trop curieuse de l’affaire Woerth/Bettencourt http://fr.rsf.org/france-ordinateurs-et-donnees-27-10-2010,38689.html

Les forces de l’ordre doivent respecter le droit du public à l’information http://fr.rsf.org/france-les-forces-de-l-ordre-doivent-22-10-2010,38644.html

La plainte du Monde http://fr.rsf.org/france-les-forces-de-l-ordre-doivent-22-10-2010,38644.html


Mauvaise colonne pour les pigistes au Groupe l'Express-Roularta

A gauche un extrait du vrai bulletin de salaire d'un pigiste du groupe l'Express-Roularta. La prime d'ancienneté est due aux pigistes en application de la Loi Cressard qui considère tout pigiste régulier comme un journaliste en CDI couvert par la Convention collective des journalistes. Mais au Groupe Express-Roularta, par un malin hasard, cette prime ne figure pas dans la colonne « montant à ajouter » mais dans la colonne... « désignation ». Résultat: l'ordinateur ne rajoute pas la prime d'ancienneté au salaire de base ; la « P.ANC.PIG. » flotte comme un libellé, enfreignant ainsi toutes les règles de paie et du code du travail. A droite votre bulletin de salaire, tel que vous auriez dû le recevoir. La différence ? Le montant de la prime d'ancienneté elle-même qui est simplement non payée. Depuis des années.

express_paie_pigistes.jpg

La direction du Groupe l'Express-Roularta estime que la Loi Cressard n'a plus lieu d'être appliquée. Les employeurs de presse n'ont-ils pas fait signer par la CFDT, au niveau national, en début d'année un «protocole d'accord pigistes» récusé par tous les syndicats, remettant en cause les principes de cette même Loi Cressard ? En introduisant un statut particulier pour les pigistes ce pseudo-accord sépare ces journalistes déjà précarisés du reste de la profession. Et, bien entendu, en matière d'ancienneté de nouvelles règles qui sont plus défavorables leur seraient imposées. D'abord à eux et ensuite aux journalistes en poste? Mais le Groupe Express-Roularta qui vient de prendre la direction du syndicat de la presse magazine, n'applique même pas non plus les clauses minimalistes de l'accord au rabais! La direction de GER n'applique pas la loi Cressard, n'applique pas le Code du Travail, n'applique rien sinon sa propre loi. FO s'est une nouvelle fois adressé à la direction. Il n'est pas trop tard pour rectifier la situation des pigistes. Il faut que cela cesse et que les salaires soient payés. FO qui rencontre l'Inspection du travail en aout, a pris contact avec tous les syndicats de l'Express-Roularta, afin que l'unité la plus large se fasse sur ce dossier: paiement des primes d'ancienneté!

(source: SGJ-FO/section GER)